Joseph Parrocel s’impose comme l’artiste le plus éminent de sa famille. Son nom est presque devenu le symbole de la peinture de bataille. Né dans le sud de la France, il séjourna à Rome et à Venise avant de s’installer à Paris à partir de 1675. L’année suivante, il est reçu à l’Académie comme «peintre pour les batailles». Grâce au marquis de Louvois, il participa deux ans plus tard aux décorations murales de l’Hôtel royal des Invalides (Les Conquêtes du roi dans le réfectoire François I^er). En 1685, il se vit confier le décor des deux premiers salons de l’appartement intérieur du roi à Versailles. Il exécuta ensuite, en 1693, un May pour Notre-Dame de Paris (Saint Jean-Baptiste prêchant, aujourd’hui au musée des Beaux-Arts d’Arras). Ses dernières années furent marquées par une nouvelle commande royale, pour le château de Marly (Le Passage du Rhin à Tolhuis par les armées du roi, musée du Louvre) et par sa promotion au sein de l’Académie où il fut nommé Conseiller.
Fort de son expérience italienne et de l’enseignement de Jacques Courtois, Parrocel développa une peinture de bataille différente de celle qui se pratiquait en France autour de Van der Meulen. Les tableaux de Parrocel illustrent une vision glorieuse de la guerre. La noblesse pouvait ainsi y trouver l’évocation d’un héroïsme dont elle était souvent privée sur les champs de bataille contemporains où dominaient désormais les fastidieuses et méthodiques opérations de siège.
Parrocel ne se limita pas à la peinture de bataille. Il dessina et grava lui-même plusieurs séries de compositions religieuses particulièrement expressives sur La Vie du Christ. Il sut également offrir à la société aristocratique de son temps la représentation de ses divertissements: la chasse aux bêtes féroces, les échanges galants entre jeunes gens, l’amusement des costumes fantaisistes, la curiosité pour l’exotisme oriental. Parrocel se révèle ainsi un des inventeurs de la scène de genre moderne telle qu’elle fleurira au 18^e siècle autour de Watteau.
Cependant, sa peinture ne se contente pas de décrire les utopies de la noblesse de Cour, elle se signale également par ses inventions stylistiques. Retrouvant les effets de touche des plus audacieux peintres italiens, Parrocel ose les confrontations de coloris rares et les empâtements savoureux. Son œuvre est l’expression la plus radicale des enjeux soulevés par la Querelle du Coloris. Étranger aux complexités narratives des sujets allégoriques ou mythologiques de la tradition classique, Joseph Parrocel expérimenta une peinture guidée par le seul plaisir de l’expressivité de la couleur, fixant dans la matière l’empreinte mouvante et spontanée de son pinceau.