Fondée en 1834, la Maison Barbedienne est sans conteste la plus illustre des entreprises de bronzes d'art en France dans la seconde moitié du 19e siècle et dans les premières décennies du 20^e. Elle connaîtra durant près d'un siècle un rayonnement international sans précédent. Son fondateur, Ferdinand Barbedienne (1810-1892), a le génie de s'associer dès 1838 à Achille Collas, l'inventeur du procédé de réduction mécanique des statues. Doté de ce nouveau système révolutionnaire, il développe à l'échelle industrielle la production de petits bronzes d'édition en puisant dans un très large répertoire de modèles allant de l'Antiquité à la sculpture contemporaine. Dès le milieu du siècle, il ajoute à la production de statuettes la fonte de bronzes monumentaux issus de commandes publiques en France, en Europe et en Amérique puis la fabrication d'objets d'art, spécialité dans laquelle il se distingue par ses innovations techniques, notamment dans le domaine de l'émaillerie où certaines créations connaissent une grande notoriété, telle la pendule monumentale de l'hôtel de ville de Paris. Le succès de la Maison repose sur l'excellence de son savoir-faire dans la sculpture d'édition, sur un choix de modèles répondant parfaitement aux exigences d'une clientèle bourgeoise en plein essor et sur la collaboration des sculpteurs vivants les plus en vogue tels Auguste Rodin (Le Baiser, L'Éternel Printemps), Antonin Mercié (Gloria Victis, David vainqueur), Paul Dubois (Le Courage militaire, La Charité), Emmanuel Frémiet et surtout Antoine-Louis Barye, le chef de file de la sculpture animalière. Dans le domaine des arts décoratifs, la Maison s'attache le service de sculpteurs ornemanistes tels Henri Cahieux, Louis-Constant Sévin et Ferdinand Levillain qui lui valent de prestigieux succès commerciaux. La présence régulière de la Maison Barbedienne aux Expositions universelles (Paris, Londres...) et les nombreuses récompenses qu'elle y reçoit favorisent l'extension de l'entreprise qui compte plusieurs centaines d'ouvriers spécialisés au début de la Troisième République. Toutefois, cet âge d'or prend fin au tournant du siècle lorsque la petite sculpture industrielle perd peu à peu de son attrait face à l'émergence de nouvelles exigences d'«originalité» de la part de la clientèle et devant la volonté des sculpteurs de mieux contrôler la diffusion de leurs œuvres. En dépit de leurs efforts, les successeurs de Ferdinand ne parviennent pas à donner une nouvelle impulsion à l'entreprise après la Grande Guerre: elle cesse son activité en 1954, victime à la fois des bouleversements économiques et sociaux (crise de 1929 et Seconde Guerre mondiale) et d'une désaffection générale pour le bronze d'art. L'ouvrage de Florence Rionnet restitue l'histoire de la Maison Barbedienne dans le contexte global d'une époque d'intenses mutations politiques, économiques, sociales et artistiques et met en lumière sa place de premier plan dans la sculpture d'édition, véritable phénomène à cette époque. Il analyse la formation de la collection de modèles, sa spécificité et l'évolution des relations avec les sculpteurs. Enfin, il traite de l'histoire du goût à travers les débats autour de l'union de l'art et de l'industrie ou du concept de multiple en sculpture. Riche de plus de mille photographies d'œuvres pour la plupart inédites, cet ouvrage contient le catalogue des quelque deux mille modèles édités par la Maison Barbedienne répertoriés à ce jour. Il constitue désormais l'outil de référence pour l'identification des bronzes Barbedienne présents dans de très nombreuses collections et qui réapparaissent régulièrement sur le marché de l'art en France et dans les grandes ventes internationales.